Le 2 juillet 2003, Mohamed Hadfi a énucléé sa femme à Nîmes. En première instance, il avait été condamné à trente ans de réclusion criminelle. Hier, son procès en appel s’est ouvert devant les assises du Vaucluse.
Samira refuse d’emblée de nous accorder un entretien. Dans quelques minutes, ce procès en appel qui la hante depuis plusieurs semaines commence. Soudain, ses quatre sœurs et ses parents nous interpellent. « Vous savez, ça lui fait vraiment mal d’être de nouveau confrontée à ce monstre », susurre Latifa, sa sœur. Samira s’approche, finalement. « Je n’ai pas de vie. Rendez-vous compte, je ne verrai jamais Imrane et Amine », lâche-t-elle d’une voix faible, évoquant ses deux enfants. « Ils sont sa revanche, estime Yasmina, une autre sœur. Ce type a voulu la détruire, et ces enfants sont la preuve qu’il n’y est pas totalement parvenu. »
Lui, c’est Mohamed Hadfi, 33 ans. « Un tortionnaire », selon les sœurs de Samira. Un être « diabolique », avait même assuré l’avocat général lors de son procès en première instance devant les assises du Gard. Samira, 31 ans, lui a été mariée de force au Maroc en 1997 après un arrangement entre leurs deux familles. Mohamed Hadfi l’aurait violentée, assure-t-elle, dès leur nuit de noces. Et, ce 2 juillet 2003, il lui a arraché les deux yeux à mains nues, dans leur appartement d’une cité sensible de Nîmes. Ce jour-là, il a plongé pour toujours son épouse dans l’obscurité, parce qu’il ne voulait pas qu’elle puisse poser son regard sur un autre.
« Bonjour, mesdames et messieurs ! » s’exclame-t-il hier à son entrée dans le box, en tentant d’emprunter une posture confiante. Pull rayé et jean délavé, son visage est pourtant tendu et ses joues creusées. Il n’a de cesse d’observer son ex-femme et ses proches. Eux ne lui portent volontairement aucune attention.
Puis la cour donne lecture de l’ordonnance de mise en accusation. L’horreur s’installe. Et alors qu’elle revit intérieurement la scène qui a détruit son existence, Samira s’écroule en larmes, comme sa mère qui tente de se dissimuler derrière son voile. La jeune femme ressent à nouveau la douleur qui avait atteint ce jour-là son paroxysme.
« Une souffrance équivalente à 150 rages de dent dans chaque œil », avait estimé en première instance un professeur ophtalmologue. « C’est la première fois en trente ans de carrière que je suis confronté à une énucléation volontaire », déclare devant la cour du Vaucluse un expert légiste.
La description des faits est si pénible que l’un des jurés est victime d’un malaise en début d’après-midi. La haine entre les deux familles est si vivace qu’une bagarre entre deux jeunes femmes éclate dès la première suspension d’audience.
Mohamed Hadfi, qui assume s’être marié pour tenter d’obtenir la nationalité française, a eu hier quelques mots pour sa victime. « Je tiens à m’excuser des douleurs que j’ai provoquées, ça n’était pas vraiment moi ce jour-là », affirme, des trémolos dans la voix, celui que les experts psychiatres qualifient d’« angoissé, tourmenté, impulsif, narcissique et animé d’une perversion sadique ».
Les experts expliquent aussi que l’accusé est doté d’une « inaffectivité quasi absolue » et d’une personnalité « psychopathique ». Dans l’une des vingt lettres qu’il avait écrites à Samira durant ses deux premières années de détention, il aurait glissé à sa femme, noir sur blanc : « Ton regard me manque. » Des détails irréels dans un procès qui l’est tout autant. Le verdict est attendu demain.
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