Une dizaine de jours après le placement d'un adolescent de 17 ans au sein de l'établissement pour mineurs (EPM) de la Valentine, à Marseille (Bouches-du-Rhône), reportage à Orvault, dans l'une de ces six structures.
« La nuit a été très calme, il n'y a eu aucun rapport d'incident », indique le premier surveillant. Satisfaction autour de la table. Comme chaque matin, représentants de la direction et des surveillants de l'établissement pour mineurs (EPM) d'Orvault, près de Nantes (Loire-Atlantique), font le point sur la journée de la veille. Au programme : nouvelles du personnel, entrées et sorties prévues, point rapide sur les détenus. L'établissement accueille 23 jeunes, prévenus et condamnés. Ils ont entre 13 et 18 ans. Les mineurs sont répartis dans six « unités de vie », en cellule individuelle, construites autour d'un terrain de foot. Ouverte en février 2008, la prison pour mineurs d'Orvault a accueilli 455 mineurs. Séjour moyen : deux mois et demi. Sur les 23 détenus actuellement présents, presque tous sont déjà connus des services de l'aide sociale à l'enfance ou de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). « Et dix sont revenus au moins trois fois », précise Dominique Lopez, directrice de l'établissement. Construits pour séparer les mineurs détenus des majeurs et lutter contre la récidive, ces nouveaux bâtiments tournés « vers l'éducatif et la réinsertion » devaient permettre à leurs occupants « de faire l'apprentissage des règles fondamentales de vie en société grâce à un encadrement renforcé », déclarait en 2007 Pascal Clément, alors garde des Sceaux. Pour y parvenir, 120 fonctionnaires, surveillants, éducateurs et enseignants allaient travailler ensemble. Du jamais vu. Selon la formule du ministre, l'EPM serait une « salle de classe entourée de murs ».
Les cours occupent une partie prépondérante de l'emploi du temps des mineurs, entre 12 et 19 heures par semaine. Ils se déroulent en petit groupe de niveau hétérogène au pôle socio-culturel, bâtiment bleu pâle, avec sa salle des profs et ses classes. A leur arrivée, « les deux tiers des mineurs étaient déscolarisés », explique Eric Thomas, le proviseur. Objectif : « redonner le goût de l'école, l'envie de travailler, la confiance en soi, bâtir un projet professionnel ». Avant leur sortie, certains mineurs passeront le brevet des collèges ou les épreuves générales du Certificat d'aptitude professionnelle (CAP). Parmi eux, Pierre (*), 16 ans et demi. L'adolescent prépare une demande pour un aménagement de peine. Pour cela, il a bénéficié de permissions de sortie qui l'ont aidé à trouver une formation de peintre en bâtiment. Ne reste plus qu'à trouver un logement. « On va s'orienter vers une famille d'accueil ou un foyer, mais il y a de moins en moins de place pour ce type de gamin à l'extérieur », souffle l'éducateur, qui fait le lien entre la prison et le « milieu ouvert ». Les mineurs partagent le reste de leur temps entre les activités et les soins. Ils bénéficient, s'ils le souhaitent, d'un suivi à l'unité de consultations et de soins ambulatoires (UCSA). Basé entre autres sur l'hygiène corporelle, les soins dentaires et le sevrage du tabac.
Cet après-midi, dans l'une des salles de cours, un atelier est organisé autour du Code de la route. « Vous n'avez pas une cigarette ? » tente un jeune assis devant un téléviseur. A ses côtés, un autre adolescent. Lui effectue son second passage à l'EPM. « Je n'aurais pas dû revenir... Et puis il y a une bagarre... et je suis là. Je pouvais pas faire autrement », tente-t-il de se justifier. Lui et son acolyte sont en attente de jugement. Dans une salle voisine, deux autres détenus composent des mosaïques. Laurent (*) a été incarcéré pour un braquage et espère ressortir d'ici à quelques mois... pour valider son année scolaire. « Je ne suis pas un délinquant, c'est une erreur de parcours. J'étais en bac pro, je ne recommencerai pas », assure-t-il tout en assemblant de petites pièces colorées.
Un peu plus loin, dans le gymnase, Simon (*), 17 ans, enchaîne les pas de danse au cours de hip-hop. C'est la quatrième fois qu'il est incarcéré pour vols avec violences. « Depuis mes dix ans, je suis passé par le foyer, les centres éducatifs renforcés, fermés, les quartiers pour mineurs. Tant que le problème à la base n'est pas réglé, ce n'est pas possible de s'en sortir. Moi, j'ai évolué quand il y avait du monde derrière moi... » « Il faut être réaliste, face à des jeunes qui ont mis en échec un certain nombre de procédures et d'alternatives, deux mois de détention, ça ne permet pas de changer radicalement l'environnement ni la façon de penser, analyse Estelle Hamon, directrice du service éducatif. Mais ce que l'on sème, on le sème aussi pour l'avenir. Le déclic peut se faire. Ce que le mineur n'aura pas mis en pratique en sortant, il pourra peut-être s'en saisir plus tard. Et remettre tout cela en route... »
(*) Les prénoms ont été modifiés
6. Le nombre d’établissements pour mineurs en France pour une capacité totale de 360 places. Ils se situent à Meyzieu (Rhône) (ouverture en juin 2007), Lavaur (Tarn) (juin 2007), Marseille (Bouches-du-Rhône), (juillet 2007), Quiévrechain (Nord), (septembre 2007), Orvault (février 2008), et Porcheville (Yvelines), (avril 2008).
723. Au 1er février 2011, 723 mineurs sont détenus. Ils représentent 1,2 % de la population pénale.
35 % sont incarcérés en EPM et 65 % en quartier mineur au sein des maisons d’arrêt, centres pénitentiaires ou centres de semi-liberté.
44. Le nombre de quartiers pour mineurs en France pour une capacité totale de 788 places
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