Prostitution : ''Il faut se positionner'' selon Osez le féminisme!

Les députés membres de la mission d’information sur la prostitution devaient rendre mercredi un rapport préconisant la pénalisation des clients pour laquelle Roselyne Bachelot est favorable. Les clients risqueraient jusqu'à 3.000 euros d'amende et une peine d’environ six mois de prison. Pour Caroline De Haas de l'association Osez le féminisme, l'ordre des mesures pris par les députés n'est pas le bon. Selon la présidente de la mission d'information, Danielle Bousquet, députée (PS), la loi de 2003 qui interdit le racolage ne serait, en effet, pas supprimée de suite mais réévaluée au bout d'un an après l'entrée en vigueur de la loi sur la pénalisation du client. Or, « il faut avant tout abolir le système prostitutionnel , explique la porte-parole de l'association Osez le féminisme! en faisant évoluer les mentalités ». « La pénalisation du client mise en avant par le gouvernement est extrêmement normative et ne suffira pas à faire face aux réseaux de prostitution », affirme encore Caroline De Haas.

Dans son communiqué de mercredi (format PDF), l'association Osez le Féminisme! dresse donc, dans l'ordre, les trois points pour enrayer le phénomène : plus de moyens pour que plan d'éducation à la sexualité dans les écoles soit effectif chaque année afin de changer les mentalités, aider à la réinsertion des prostituées qui le souhaitent, puis abroger la loi de 2003 sur le racolage pour renverser la pénalisation sur les clients des prostituées.

Il n'est pas question « de faire une loi en fonction de la liberté individuelle de quelques unes »

« Ce n'est pas un problème moral, il faut se positionner afin de mettre en place une loi pour la majorité des prostituées », explique la porte-parole de l'association féministe. Car même si la prostitution est « un sujet sensible » touchant à la sexualité et aussi à la liberté individuelle des prostituées indépendantes, Caroline De Haas rappelle qu'en France « dans 95% des cas, des femmes sont concernées par la traite de l'être humain ». Il n'est donc pas question de savoir si la prostitution volontaire et indépendante des femmes est bonne ou mauvaise, tout comme il n'est pas question « de faire une loi en fonction de la liberté individuelle de quelques unes », selon elle. Concernant la situation des femmes qui prennent volontairement le statut d'auto-entrepreneuses pour exercer, « il s'agit donc bien d'abolir avant tout les sanctions sur les prostituées relatives à la loi sur le racolage de 2003, pour que ni celles-ci ne soient lésées et que ni les autres, contraintes à se prostituer, soient doublement punies ».

« Il faut en finir avec cette idée d'une libido plus forte chez les hommes »

« Il faut en finir avec cette idée d'inégalité sexuelle entre les hommes et les femmes grâce à laquelle la prostitution est tolérée dans les esprits sous prétexte que les hommes ont une libido débordante ce qui n'a jamais été prouvé scientifiquement », s'indigne encore la défendresse des droits des femmes.

Caroline De Haas veut que l'Etat ait un message claire sur la prostitution. En France, la pratique n'est ni un délit ni librement autorisée depuis la loi sur le racolage de 2003. La porte-parole de l'association féministe proscrit pourtant tout encadrement légal comme en Suède, en Allemagne ou aux Pays-Bas. « Ceci ne ferait que donner plus de moyens aux réseaux de prostitution qui trouvent toujours des parades pour contourner la loi. Et l'on en arriverait au point de ce qui se fait en Allemagne durant les soldes vestimentaires lorsque les bordels pratiquent aussi des prix bradés au même moment ».

Tout comme la présidente de la mission d'information des députés, Danielle Bousquet, l'a déclaré dans une interview au Parisien mercredi, Caroline De Haas défend aussi l'idée qu'il faut faire passer le message dès le plus jeune âge sur le fait que le corps humain ne s'achète pas. « La limite à ne pas franchir est celle du corps humain, au même titre que la vente d'organes, pour éviter là aussi toutes les inégalités : Nord/Sud, riches/pauvres et hommes/femmes, conclut-elle.